Au-dessus de 900 m, l'Obersalzberg est recouvert de neige.  Le sixième hiver de guerre avait commencé et l'on ne se rendait plus à son travail qu'à contrecœur.  Chaque jour, des escadrilles d'avions ennemis survolaient la montagne. Pas un jour ne s'écoulait sans qu'il ne faille se réfugier dans les abris et que des mesures de camouflage par brouillard artificiel ne soient prises.  La fumée s'échappait alors de grands tonneaux et recouvrait l'Obersalzberg pendant des heures. On entendait les explosions des bombes qui tombaient sur Munich, Mühldorf et Linz.  Le 25 avril 1945, vint le "Dies Irae", le jour de colère sur l'Obersalzberg et l'affaire devint sérieuse.  Supposant qu'Hitler et son entourage se trouvaient encore à l'Obersalzberg, la "Royal Airforce" bombardait l'Obersalzberg. 9.30: première alerte.  Les ouvriers se réfugièrent dans les bunkers.  La première vague d'assaut eut lieu 30 minutes plus tard.  Les 1100 bombardiers composant les deux vagues 275 R.A.F. britanniques Lancasters et Mosquitos et 98 Mustangs de la 8ème US Air Force survolèrent la montagne en larguant 1232 tonnes de bombes de gros calibre (500 kg) ! Volant très bas afin de profiter de la protection des Alpes, ils s'approchèrent de la cible qui leur avait été décrite dans une détermination d'objectif datée du 5 octobre 1944. Les premières bombes tombèrent sur les cités de la Buchenhëhe et de la Klaushöhe. Tous les bâtiments importants et de nombreux bâtiments moins importants autour des objectifs subirent aussi les effets du bombardement. La caserne des SS a été gravement endommagée. La partie centrale a été détruite, une autre abîmée par une attaque directe et la moitié de l'étage supérieur d'une troisième partie a sauté. Il n'y a que la Kehlsteinhaus qui resta indemne. La première vague aurait sûrement été reçue à coups de canons par la défense antiaérienne d'Obersalzberg si le système d'alarme avait fonctionné à temps. Ce n'en fut pas le cas. Le réseau allemand d'alarme aérien avait été devenu inefficace, voire détruit. Le camouflage par brouillard artificiel aurait nécessité une préparation de 20 minutes. Cette situation se vit empirer par une nouvelle offensive américaine par des bombardiers B 17 Flying Fortress et Liberator à quatre moteurs. Leur objectif n'était pas les canons de défense, mais Obersalzberg et principalement la Haus Wachenfeld (le Berghof, résidence d'Hitler), Hallein, Salzbourg et Bad Reichenhall. Les pilotes avaient du mal à cause de la neige à reconnaître les points d'impact et passèrent une deuxième fois à l'attaque. Leur travail d'anéantissement se fit cette fois-ci de manière plus systématique. Pendant une heure entière, les bombes de 500 kg labourèrent l'Obersalzberg. Les batteries de canons antiaériens s'étaient mises en position de défense et ouvrirent le feu sur les assaillants. Certains furent atteints, mais l'on ne put en préciser le nombre exact car les nombreux événements des jours suivants rendirent impossible toute recherche. La plupart des canonniers avaient entre 16 et 18 ans et appartenaient au RAD (Service de Défense du Reich). C'était un jour de printemps d'un bleu rayonnant, quand la montagne du (faux) salut se transforma en une montagne de la mort. Puis, ce fut le silence. On prit conscience de l'étendue du bombardement plusieurs heures après, lorsque la fumée se fut dissipée. Le dernier bombardement de la deuxième guerre mondiale était fini. Grâce au système des galeries souterraines, il n'y eut que peu de morts à l'Obersalzberg. Selon le journal local, le "Berchtesgadener Anzeiger" du 30 avril 1945, il y avait 31 victimes au total. D'autres sources ne mentionnent que 6 victimes et quelques blessés. Le même jour, Bad Reichenhall était bombardée et 200 personnes périrent. L'Obersalzberg fut très atteint. Pourtant les explosifs destinés au Nid d'Aigle détonnèrent sans causer de dommages sur les falaises sur lesquels il fut construit. Il est difficile d'atteindre une cible de ce genre en haute montagne d'autant plus que les canons antiaériens très efficaces en donnèrent peu de chances à l'assaillant. Le bombardement d'Obersalzberg, de Berchtesgaden, de Bad Reichenhall, de Salzbourg et du Nid d'Aigle du 25 avril 1945 n'eut aucune valeur militaire à ce stade tardif de la guerre. De ce fait accordons-lui une valeur politique. Après le bombardement, les ruines étaient le lieu recherché par les maraudeurs. Ensuite la montagne fut fermée et on ne pouvait pas y entrer sans une autorisation spéciale. Après la réouverture, de véritables foules faisaient le pèlerinage à l'Obersalzberg. Pour prévenir toute vénération, on a ordonné le déblaiement de toutes les ruines en 1952 aux instances du gouvernement bavarois sous le ministre-président Högner. Exception faite pour le Nid d'Aigle, l'Hôtel Türken et la ruine de l'ancienne maison des invités.