Les gens de l'époque se représentaient le Berghof comme une ferme bien aménagée, d'une certaine importance et possédant un caractère rustique. Ces critères disparurent après les transformations successives que subit la maison Wachenfeld. La transformation du Berghof alla de pair avec l'ascension et la puissance d’Hitler. Le célèbre architecte Degano entreprit les premières petites transformations mais réussit à conserver néanmoins le style rustique de l'époque. Étant donné que Hitler traçait lui-même ses plans, il était parfois difficile pour l'architecte de satisfaire les désirs du maître d’œuvre. Cela tenait encore toutefois du raisonnable. Lorsqu’Hitler devint Chancelier du Reich, les amis du parti ne cessèrent d'affluer à l'Obersalzberg. Ils s'établirent tout d'abord dans les auberges avoisinantes. Rudolf Hess s'occupa au début de traiter avec les propriétaires fonciers de l'époque dans le but d'acheter les maisons et les terrains. Il eut ensuite à assumer des tâches politiques et ce fut Martin Bormann qui prit la relève. Il se vit confier l'ensemble de l'organisation de l'Obersalzberg. Il se chargea tout d'abord du "Berqhof" d'Hitler. Il l'agrandit considérablement en lui ajoutant un étage. Sur la façade, un large escalier conduisait à un hall d'entrée de style gothique garni de colonnes de marbre. De là, on accédait à la célèbre salle de conférences avec sa fenêtre à coulisse. A côté de la salle de conférences que nous venons de citer, se trouvaient encore un vestibule, une salle à manger, une salle de garde, une salle réservée au personnel, une grande cuisine et deux pièces pour les officiers d'ordonnance. Le hall de conférence est de grand style avec des plafonds lourds en bois taillé à la main et des lambris. Meublé avec des tapis d'Orient de grande valeur, des tableaux, des objets d'art furent choisis et combinés avec beaucoup de goût, une cheminée en marbre italien et des fauteuils confortables. Dans le coin un piano à queue "Bechsteill". Hitler aimait jouer du piano pendant ses loisirs, son compositeur préféré était Richard Wagner. C'était sans doute la pièce la plus impressionnante dans le Berghof. Chaque invité, et surtout Hitler lui-même, ne pouvait que se sentir bien dans ce beau domicile alpin. Au premier étage, il y avait les pièces d'habitation et la chambre d'Hitler ainsi que d'autres pièces destinées aux invités. Les garages se trouvaient au rez-de-chaussée, la chaufferie et le bowling un étage plus bas. Seuls les matériaux les plus nobles furent utilisés. Fenêtres à sertissures en plomb, meubles Biedermeier ou baroques, lampes de valeur, marbre, bois précieux, pierres naturelles et poêles de faïencé. Dans le bureau d'Adolf Hitler au Berghof, seuls des matériaux de première qualité furent utilisés dans l'aménagement. Des tableaux et des livres de valeur, des tapis et des gobelins précieux complétaient l'intérieur. Au moment des grands travaux d'aménagement, Hitler avait envisagé de dédier à ses livres un bâtiment particulier. Il y avait finalement renoncé et 3000 livres, soigneusement reliés, trouvèrent place dans une bibliothèque, ainsi que sur des étagères disséminées dans le corps principal de la villa. Pour la plupart retrouvés dans une mine de sel près de Berchtesgaden par les Américains en 1945, ils furent transportés aux États-Unis. La bibliothèque du Congrès en conserve encore environ 1200. Ceux que l'on n'avait pas eu le temps de mettre à l'abri furent soustraits par les premiers conquérants de l'Obersalzberg. Avant d'entreprendre les transformations, Bormann décida l'élargissement de la route allant de Berchtesgaden à l'Obersalzberg. On établit également un nouveau tracé depuis Oberau. En mars 1943, il ordonnera formellement à Bormann de ne plus rien y entreprendre. Son secrétaire ne mettra pas longtemps à le faire changer d'avis, invoquant des raisons de sécurité pour entamer un projet de ville souterraine destinée à mettre les milliers d'occupants de l'Obersalzberg à l'abri des bombardements. Bien que les grands pèlerinages populaires eussent été supprimés après l'invasion de l'URSS, l'Obersalzberg ne désemplissait pas et seule la Führersperrgebiet continuait à jouir de la tranquillité désormais très organisée de la montagne. "Quand la guerre sera finie, je me chercherai une vallée bien tranquille et m'y bâtirai un chalet comme le premier", soupira un jour le Führer qui semblait s'agacer de l'invasion de son plateau.